le curé d'Ars…

 

 

Ce sont là, évidemment, des faits extraordinaires, mais il y a plus fort encore. Il est certain que l'abbé Vianney a eu souvent des conversations avec Dieu et la Sainte Vierge.
– « Avec la Sainte Vierge, nous nous connaissons bien », dit-il un jour avec un sourire. Il lui est arrivé même de se plaindre quand il reste quelque temps sans avoir de célestes visites.
– « Tout de même, » soupira-t-il une fois qu'il se croyait seul, « je n'ai pas vu le bon Dieu depuis dimanche ! »
Peu à peu pourtant, sa santé s'affaiblit. On ne vit pas pendant quarante ans avec deux ou trois heures de sommeil, et un seul repas par jour, sans sentir le corps s'user, la fatigue s'accumuler, et la vieillesse peser lourdement sur les épaules.
– « Mon Père, si le bon Dieu donnait à choisir, » lui demande son vicaire « monter au Ciel tout de suite, ou travailler comme vous le faites à convertir des pêcheurs, que choisiriez-vous ?
– Mon ami, je resterais ! Quelle joie de faire cheminer des âmes vers Dieu. »
Le curé vieillit et les pèlerins ne font qu'augmenter. Aussi le vieillard -le temps lui faisant défaut- rogne-t-il encore sur son sommeil et sa nourriture, n'acceptant seulement qu'une tasse de lait le soir. Parfois, c'est son seul repas. Et il tousse à faire pitié.
Un jour, il arrive vers midi chez Catherine Lassagne :
– « Ah ! je n'en puis plus !
– Asseyez-vous un instant. » dit Catherine, « je vais vous faire chauffer du lait. »
– « Oh ! non, » dit-il, « c'est mon lit qu'il me faut. »
Et il sort pour monter se coucher sur son grabat.

Catherine tient bon. Elle fait chauffer le lait et se dirige vers le presbytère ; elle rencontre en chemin le curé qui retourne déjà à l'église.
– « Monsieur le Curé, buvez ceci.
– Non, je ne veux rien.
– Il faut prendre ce lait. »
A force d'insistance, il accepte la tasse de lait, qu'il boit devant les pèlerins.
Le soir, il avoue à Catherine :
– « Tout de même, je crois que sans votre lait, je n'aurais pas pu aller au bout de la journée. »

De temps en temps, il tombe en faiblesse. et il lui arrive de s'assoupir à son confessionnal. Alors les pèlerins font soigneusement silence, afin de lui laisser un moment de repos.
Néanmoins, il reste toujours actif, il étudie le plan de l'église qu'il désire faire bâtir en l'honneur de sainte Philomène : quatre mois avant sa mort, il lance une souscription dans ce but.
– « Je prierai le bon Dieu pour ceux qui m'aideront à bâtir une église à Sainte Philomène. » Ce sont les dernières phrases qu'il ait écrites.

A la même époque, il reçoit la visite de Pauline Jaricot, la Fondatrice de la Propagation de le Foi, vieillie et lassée par toutes ses épreuves. Elle avait très froid, étant venue par la bise et la neige. Le curé va chercher de la paille et des branches pour faire du feu. Mais tout est humide, et le feu ne prend pas. « Cela ne fait rien, dit Pauline, je suis habituée au froid. Donnez-moi plutôt un peu d'espérance. » Et le curé lui parle et lui donne une petite croix de bois.

Il semble pressentir la date de sa mort. En juillet 1859, une bonne chrétienne de Saint-Etienne Madame Pauze, vient se confesser. Le Curé lui parle de saint Jean-François Régis, et du pèlerinage de La Louvesc qu'il a fait autrefois, et où cette dame va tous les ans.
– « Au revoir, mon enfant, » lui dit-il « dans 3 semaines nous nous reverrons. »
Trois semaines plus tard, l'abbé Vianney et Madame Pauze mouraient presque en même temps, et pouvaient donc se rencontrer devant le Seigneur.

Le 29 juillet 1859 est sa dernière journée de ministère. Il y avait de l'orage, il se sentait malade dès le lever. Pourtant, à une heure du matin, il est au confessionnal, alors que dans l'église il fait si chaud que sans arrêt, des pèlerins doivent sortir pour respirer un peu. Le Curé doit être conduit plusieurs fois dehors pour prendre l'air. Il n'en peut plus et pourtant il confesse pendant 16 heures. On ne comprend pas un mot à son catéchisme ; on le voit seulement jeter des regards pleins d'amour vers le tabernacle.

Dans la nuit du 30 juillet, Monsieur Vianney appelle Catherine Lassagne qui veillera sur lui jusqu'au bout.
– « C'est la fin, » dit-il, « il faut aller chercher le curé de Jassans.»
– « Je vais chercher aussi le médecin ? »
– « C'est inutile, le médecin n'y fera rien. »
Désolés, les paroissiens accourent, montent sur le palier, essaient d'apercevoir une dernière fois leur bon prêtre.
Le 2 août, on lui donne les derniers sacrements.
– « Que Dieu est bon, » dit-il, « quand on ne peut plus aller Le voir, c'est Lui qui vient. »

Monseigneur l'évêque de Belley, ayant appris que le Curé d'Ars se meurt, quitte précipitamment le petit séminaire de Meximieux, où ils s'apprêtait à présider une cérémonie, pour se rendre au chevet du moribond. Le malade le reconnaît, lui sourit, essaye de le remercier.
Et le jeudi 4 août, à 2h00 du matin, le saint curé rend son âme à Dieu, pendant qu'auprès de lui, un prêtre achève les prières des agonisants :
– « Que les saints Anges de Dieu viennent à sa rencontre et l'introduisent… »

Le glas se met à sonner au clocher d'Ars. Dans toute le région, la nouvelle se répand ; de partout les pèlerins arrivent… L'enterrement est un triomphe : 6000 personnes, 300 prêtres autour de l'évêque qui officie. Tous prient pour celui qu'ils appellent déjà "le saint".
En 1905, le saint Pape Pie X élève à la gloire des bienheureux l'humble petit Curé, et le donne comme patron à tous les curés de France. En 1925, devant 70 000 pèlerins du monde entier, Jean-Marie Vianney est proclamé « saint ».

Depuis 1859, le petit village d'Ars n'a pas cessé d'être un lieu de pèlerinage. Des retraites s'y donnent pour les prêtres mais aussi pour les fidèles. Le 4 août de chaque année, de grandes foules s'y rassemblent pour prier saint Jean-Marie Vianney. Un couvent de Carmélites s'y est installé : de pieuses femmes y consacrent leur vie entière à prier et à faire pénitence pour que les prêtres deviennent des saints.
 

Le Curé d'Ars a dit une fois à l'un de ses catéchismes : « Laissez une paroisse sans prêtre pendant 20 ans, et l'on y adorera la Bête… » Hélas ! Il y a de nos jours beaucoup -et de plus en plus- de paroisses sans prêtre !
Si tu as appris à aimer le curé d'Ars, ferme les yeux un moment… adresse-lui une prière fervente pour que les prêtres de France soit plus nombreux et qu'ils soient de "saints" prêtres à l'exemple de Jean-Marie Vianney.






Le saint curé d'Ars… Jean-Baptiste-Marie Vianney
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L'auteur est l'abbé Claude Falc'Hun - 1957
Les illustrations sont de Jean Dupin et Pierre Leconte



 
 
le curé d'Ars…
 
Jean-Marie Vianney