Tu avances en aveugle, et notre voix te guide, mais tu n’entends point nos sollicitations.
Est-ce nonchalance ou refus de notre présence ?
Et pourtant...

Quand la brume descend lentement sur la terre, épaississant le lourd couvercle qui écrase peu à peu l’être, toutes choses disparaissent aux yeux, et même si les mains frottent vigoureusement les paupières, et si ces yeux s’écarquillent pour scruter, ils ne perçoivent que le coton effiloché et opaque qui lentement estompe et noie...
Quand la brume épaisse lentement rampe vers vous, feutrant tous bruits, vos sens engourdis ne peuvent même plus percevoir, proche ou lointain, le tintement d’une clochette ou le carillon d’une cloche et vos sens paralysés s’assoupissent et s’endorment, et vous vous laissez aller en cette torpeur ouatée avec au cœur le sentiment qu’il est inutile de réagir puisque tout s’assourdit et s’étouffe.

Mais, amis, le sentiment de vigilance devrait être là : réveiller vos sens engourdis, faire ouvrir plus grands vos yeux pour chercher et guetter ce que cette ouate épaisse cache, pour être attentifs au moindre écho derrière ce rideau cotonneux et dangereux.
Alors, amis, quand marchant à tâtons dans ce danger feutré, le cœur angoissé s’inquiète de l’issue, ah ! que la voix amie qui appelle et dirige est douce à entendre !
Et le cœur bondit de joie, et l’on va, et l’on court, vers le son de cette voix qui va nous guider, enfin, vers des clartés brillantes.

As-tu couru, ami, vers cette voix qui t’appelait ?...

 

Raphaël Archange
extrait du livre Ephphata
médium : marcelle olivério