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Diables
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Les
exorcismes : la mode est à la récession !
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Evolution
restrictive
« N'importe quel prêtre, surtout curé,
et n'importe quel diacre ou sous-diacre peut exorciser,
si cela lui est confié par l'évêque
Le peut aussi n'importe quel exorciste aux mêmes conditions
» [Ed. de 1587]
Le « Rutel romain de Santori témoigne de la
même ouverture de cette fonction aux prêtres,
diacres et simples exorcistes. Certes, l'exercice de ce
ministère était contrôlé.
En
1744, il n'est plus fait aucune mention des simples exorcistes
Aujourd'hui, le ministère tombe en désuétude
dans de nombreux diocèses où on ne nomme plus
d'exorcistes.
Pourquoi
?
L'action des démons semblait jugulée dans
les pays chrétiens, en contraste avec les pays païens
où les missionnaires avaient fort à faire.
Il paraissait donc de plus en plus superflu de désigner
des exorcistes.
Par ailleurs, il fallait remédier à une polarisation
excessive sur le démon. Il y eut des abus certains
:
D'une part,
les procès de sorcières où les juges
n'avaient que trop de moyens de justifier les accusations
-vraies ou fausses- la torture aidant ;
D'autre
part, les exorcistes auxquels on donna parfois une publicité
abusive et malfaisante notamment pour la communauté
des ursulines possédées de Loudun
«
Les plus diserts et les plus écoutés sont
les démons eux-mêmes qui se manifestent avec
d'autant plus de complaisance que les exorcismes ont repris,
[
] en public, devant une foule de curieux, goguenards
et
impressionnés. » [Le procès
d'Urbain Grandier]
Au XIXe siècle, plus radicalement, dans un climat
philosophique idéaliste et rationaliste, beaucoup
en vinrent à réduire les phénomènes
présumés de possession, à des troubles
psychiatriques. Plus généralement, attribuer
au diable tous les maux, n'était-ce pas un alibi
irresponsable pour se dispenser d'identifier les causes
naturelles ?
Influence du père de Tonquédec
En France, cette tendance fut accentuée par le père
J. de Tonquédec. Il avait été nommé
exorciste de Paris afin de succéder à un prêtre
trop crédule. Il aborda donc son ministère
avec un sens critique rigoureux durci par l'obéissance.
Il appartenait, en outre, à une génération
impressionnée par les diktats du scientisme et la
rigueur du déterminisme. [
]
Chargé du cas d'Yvonne Beauvais, une mystique de
haut niveau, qui avait typiquement besoin d'un exorcisme
parce qu'elle était persécutée par
le démon, il semble n'avoir JAMAIS songé à
l'exorciser -ce que d'autres prêtres et un évêque
ont fait- pour un soulagement de son épreuve.
Plus tard, un jeune prêtre qui avait discerné
une influence probable du démon chez une de ses pénitentes
l'envoya chez l'exorciste officiel de Paris qui conclut
:
« C'est une malade, il faut l'interner. »
Le jeune prêtre, docile, s'y résigna. Mais
la folle n'était pas si folle que cela. Elle observa
les entrées et les sorties de l'hôpital psychiatrique
et s'éclipsa. Le prêtre qui la dirigeait la
retrouva ainsi à la messe [
] Les troubles avaient
disparu. Cela éveilla chez son directeur de conscience
une vocation d'exorciste pour un discernement plus ouvert.
On a fait au père de Tonquédec la réputation
d'un exorciste qui n'exorcise jamais
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Marginalisation
de l'exorcisme
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Le
concile qui avait réformé tant de choses de
la cave au grenier de l'Eglise, n'a pas touché à
l'exorcisme, sujet secrètement redouté, souvent
considéré comme marginal, voire périmé.
Les réformes liturgiques éliminèrent
purement et simplement l'ordre d'exorciste et ont éliminé
plusieurs textes traditionnels sur le démon. Pour
les rites baptismaux, les trois exorcismes impératifs
du baptême des enfants ont été éliminés
au profit de deux formules où le nom de Satan figure
de manière ambiguë propre à satisfaire
la théorie purement symbolique ? Paul VI n'a pas
pu s'empêcher d'en exprimer son regret.
Le nouveau code, très laconique, ne prescrit pas
même l'obligation, pour l'évêque, d'assurer,
dans son diocèse, l'exercice de cette fonction. Il
ne reste plus que ces prescriptions négatives et
limitatives :
« Nul ne peut prononcer légitimement
un exorcisme sur les assiégés s'il n'a obtenu
une permission particulière et expresse
Que cette permission soit accordée seulement
à un prêtre [N.d.l.r. - le mot est au singulier]
doué de piété, de science, de prudence
et d'intégrité de vie
»
Le droit canon ne prévoit pas les autres qualités
telles que charisme
expérience
compétence
spirituelle et psychologique
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Aujourd'hui,
le démon existe-t-il ? Agit-il ?
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Diables
& démons
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A
l'époque moderne, et surtout depuis les années
60, de larges courants d'opinion issus de la critique rationaliste
ont mis en doute l'influence ou même l'existence du
démon, et ce jusque dans l'Eglise.ð
« Bien rares sont parmi les chrétiens de notre
temps ceux qui croient réellement, effectivement
au démon
[
] Beaucoup ne font pas de difficultés
à reconnaître qu'ils n'acceptent pas de croire
à l'existence même de Satan. D'autres ne s'y
résolvent qu'à la condition d'interpréter
cette croyance de façon symbolique, identifiant le
démon au Mal (aux forces mauvaises, au péché
aux tendances perverses) auquel ils confèrent de
la sorte une existence propre, détachée de
tout suppôt
[Satan : études carmélites
- 1948]
D'autres en font une antithése absolue, assimilable
au « néant » plutôt qu'à
l'« être
». Une éponge
réduite à ses trous
« Ce n'est pas un ange mauvais, c'est un non-ange,
car le néant n'est ni apparence, ni être. Celui
qu'on appelle « l'ange des ténèbres »
n'est donc pas un ex-ange de Lumière. Il est non-être,
non-existence, non-savoir. Il est mensonge, irréalité,
vide, non-personne
comme l'ombre, il n'a pas de consistance
»
Tentatives
de liquidation
C. Balducci s'est étonné [N.d.l.r. - Pas nous
!]que Walter Kasper, théologien allemand, ait été
promu évêque après son livre sur le
démon ou il affirmait notamment :
« Le diable n'est pas une figure personnelle mais
une non-figure [
] On peut y croire en un sens proprement
théologique. L'acte de foi se réfère
exclusivement à Dieu, à Jésus-Christ
et à l'Esprit saint. On ne donne aucune foi au diable,
foi, qui, en dernière analyse, ne serait rien d'autre
que superstition. [Il diavolo p. 72]
Raz de marée
Raz de marée des ouvrages rejetant, à divers
degrés, l'existence du diable.
Juste un exemple : Aux facultés universitaires Saint-Louis
de Bruxelles, un Symposium était consacré
aux « Figures du démoniaque, hier et aujourd'hui »
édité aux Facultés en 1992. La dernière
conférence du père Christian Duquoc concluait
:
«
Quoi qu'il en soit, il faut à tout prix éviter
de faire jouer à Satan le rôle de bouc émissaire
: il ne répond pas à la question de l'origine
du Mal. Il la rend plus mystérieuse ou plus vertigineuse,
puisque, par hypothèse, le Mal est devenu en lui
dans une liberté quasi pure, non grevée par
la faiblesse de l'humanité et des passions. »
Après avoir souligné l''« indécision
de la communauté catholique » où «
l'enfer et Satan ont presque déserté la prédication
la plus officielle », il craint toutefois que l'horreur
retirée à Satan ne soit « restituée
à Dieu : "un Dieu pervers", selon le titre
d'un ouvrage de M. Bellet » [N.d.l.r. - C'est ce que
l'on entend souvent : « Pourquoi Dieu permet ? C'est
trop facile de mettre tout cela sur les effets d'un Amour
Infini de Dieu qui nous aurait laissé intact notre
libre-arbitre pour avoir le mérite de faire le choix
du Bien
»
[
]
Quand l'a priori du doute oriente la recherche, rien n'y
résiste
Pourquoi ces réductions
A cause d'une foi sans religion
La tendance théologique
très en vogue après le concile, à préconiser
une foi sans religion, a joué dans le même
sens. On considère les rites comme magie à
éliminer, et les symboles traditionnels comme survivances
périmées. Ainsi a-t-on éliminé
les exorcismes de l'eau et du sel, ainsi que le sel dans
le sacrement de baptême.
« Dans la liturgie du baptême, on a raccourci
les exorcismes. Je ne sais si ce fut là chose très
réaliste et bien trouvée. » [Paul VI
- 1972]
Cette phrase a été expurgée [censurée
- N.d.l.r.] dans les éditions, mais elle est parfaitement
claire en ce qui concerne les enregistrements aussi bien
privés qu'officiels. Ces réductions ne peuvent
pas être sans conséquences, y compris sur la
baisse de la pratique religieuse.
A cela s'ajoute une tendance théologique rationaliste
déjà représentée au XVIIème
siècle, qui réduisait le "surnaturel"
à un mode caché de la nature
La conception
rigoureuse du déterminisme scientiste a incliné
beaucoup de théologien en ce sens
C'est sous ces pressions culturelles que nombre de chrétiens
et théologiens déploient les arguments qui
suivent :
«
Jésus-Christ ne croyait pas au démon, mais
il en parlait et faisait des exorcismes pour s'adapter à
la culture de son temps. »
«
Cela fait partie du passé mythologique de l'Eglise
»
«
Le Mal existe, mais c'est artificiellement qu'on le personnifie.
Le malin n'est qu'un symbole. »
«
Le Mal n'est rien, ce n'est qu'un manque. Ce qui est vrai
du Mal, s'applique aussi au malin. »
«
C'est la foi en Dieu qui sauve. Le démon y est étranger
»
C'est vrai en un sens, mais la reconnaissance du démon
est nécessaire pour éclairer le combat spirituel
L'ignorance et la négation de Satan ont grandement
servi son retour en force dans notre civilisation, où
de nouvelles proliférations du Mal s'expliquent difficilement
sans son action.
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