Quand le Ciel parle…

…le Ciel pleure

 

18 décembre 1983

   
   

Les jours passent, s'écoulent, le temps s'enfuit, emportant dans les plis épais et sombres de son manteau de nuit les échos de larmes, de sanglots et de rires qui montent, puissamment exprimés par des détresses ou des joies, vers ce Plan lointain où attendent et prient, pour le destin d'une Humanité terriblement atteinte et touchée, ces Esprits lumineux et purs qui ne voudraient offrir qu'amour et paix à des Humains dont les cerveaux fous et délirants ne savent plus comprendre et ne peuvent plus qu'inventer, susciter des sujets de drames et de souffrances…

Les lumières brillent à travers des rues qui ne sont pourtant pleines que de drames et de craintes ; les devantures des magasins resplendissent de lumières et de clinquants destinés à attirer, à accaparer l'attention des chalands affairés afin de proposer et de susciter un désir plus violent encore de ces biens matériels que vos jours ne peuvent plus que porter au pinacle de vos vies…
Les clinquants resplendissent et brillent, et une fausse joie s'installe dans une fausse euphorie pour tous ces Humains qui, d'un pas pressé, essaient de retrouver des demeures que, dans quelques jours -ou déjà- ils vont essayer -ou ont essayé- de rendre accueillantes, non pas pour la venue de cet Etre de Lumière et de Pureté qui s'offrait dans l'amour à la naissance d'une vie, mais pour la venue d'amis qui, insouciants et inconscients, oublieront, dans des agapes embrumées d'alcool, les soucis d'une vie difficile et jusqu'au souvenir d'une naissance douloureuse…
Dans quelques jours, les cloches vont retentir, des messes de minuit -qui ne sont plus de minuit- verront des fidèles pressés venir chanter dans un chœur : « Il est né le divin enfant…» et les alléluias résonneront sur une Terre qui n'est qu'un sanglot et qu'un drame…

Pendant que se préparent ces agapes et ces festivités, très loin, dans la pureté infinie d'un Plan que vos regards hélas, ne peuvent encore contempler, un Esprit de Lumière, tout de blanc vêtu, mains écartées dans un geste d'offrande, contemple et souffre.

Regardez cet Etre lumineux, enfants : le visage est pur et lisse, les mains sont blanches et pures, la peau vous semble douce et parfaite, mais qui regarde attentivement pourra voir sur un front qui semble serein et sur deux mains tendues, les traces profondes et indélébiles qui ponctuent, comme autant de souvenirs lancinants, la mémoire de ces Humains qui n'ont su encenser la Pureté et l'Amour que par l'abandon dans l'horreur du drame et dans la noirceur des vies.

Les Humains se préparent à fêter Noël et l'on pense au menu, à la toilette, à la réunion.
Les esprits sont pleins de ces pensées futiles :
on calcule, on suppute, on espère, on attend…
Savez-vous qu'à travers l'espace, à travers le temps, peut revivre devant vous une autre attente qui s'exprimait, non dans la joie et la curiosité avide, mais dans la souffrance, la douleur, la prière ? Car, tandis que Marie et Joseph cheminaient sur des chemins difficiles pour fuir les horreurs d'un autre drame et trouver un havre de paix, l'Esprit lumineux qui devait consommer un jour ce sacrifice divin, à genoux, en prière, mains jointes, tête baissée, déjà inclinée comme sous le poids trop lourd d'une couronne qui allait déchirer ses chairs, corps ployé, déjà ployé comme sous le poids d'une croix trop lourde qui allait voir s'enfuir sa vie, cet Etre de Lumière, agenouillé dans ces sphères célestes et lumineuses de douceur et de paix, contemplait cette Terre sombre, cette Terre où, solitaire, il allait devoir commencer un chemin de souffrance qui allait le conduire à travers l'incompréhension, l'ironie, l'hypocrisie, la haine, vers ce point de son destin où tout enfin serait consommé, consommé dans la douleur, dans le désespoir, consommé dans la haine implacable et l'avilissement d'Humains qui pirouetteraient jusqu'au moment où la compréhension définitive de leurs gestes deviendrait lumière pour éclairer la scène de leur crime et de leur carnage…
Agenouillé, silencieux, plein de souffrance, cœur douloureux, baigné, nimbé, auréolé d'une lumière brillante et chaude, il regarde et pense…

La Terre est là, en bas, terre stérile et âpre, aux routes cahoteuses, empierrées, où la souffrance des peuples déjà s'exprime alors que les oppresseurs puissants se réjouissent dans des orgies et un vice qui les font se gausser et s'abstraire.
Cœur douloureux, esprit perdu, il regarde et contemple…
Que regarde-t-il cet Etre d'Amour et de Lumière ?…
Regarde-t-il les villes où le riche, loin de la vie du pauvre, s'ébat dans une vie facile et heureuse ?…
Regarde-t-il la souffrance des êtres persécutés, désemparés et perdus ?…
Que contemple-t-il cet Esprit de Lumière dont le cœur trop pesant déjà, comme en une répétition difficile, exprime la souffrance, et dont les yeux déjà, comme en un prélude douloureux, laissent couler des larmes qui vont se perdre dans l'infini immense qui l'entoure et le berce ?… Il regarde la scène où bientôt, enfant fragile prisonnier d'un corps, il poussera un premier cri pour dire à son divin Père qu'il vient de prendre rang parmi les Humains et que son destin de souffrance va commencer.
Il contemple la Terre où une jeune femme pure, auréolée aussi de lumière, va attendre dans la joie le premier cri de ce bébé annoncé par un ange et qui sera le Maître du destin des Hommes, enfant fragile tenant dans ses deux mains unies la Terre, le Monde, l'Univers, les Galaxies…
Il contemple la Terre, scène de ce théâtre où, du prologue à la fin, se déroulera sa vie partagée entre l'amour dispensé et le drame vécu.
Il contemple la scène où déjà résonnent les échos lointains des cris de joie de ceux qui encenseront sa venue et adoreront ses pas et où, pourtant, s'expriment déjà les huées sarcastiques et haineuses qui réclameront la vie d'un autre au détriment de la sienne ; et il entend déjà, comme en un prélude, l'écho lointain des mensonges, l'écho lointain du reniement, l'écho profond de la trahison.
Il entend déjà les huées de la foule, les appels à la mort, il voit déjà l'abandon des êtres ; il contemple sur l'horizon sanglant et rouge de son destin, le visage livide et tiré de souffrance de celui qui, ayant tout donné parce que venu les bras pleins de tendresse, les bras pleins d'amour, a maintenant tout reçu dans l'opprobre, la calomnie et le drame.
Et ses yeux restent fixés sur cette pauvre silhouette que des Humains fous, que des Humains déchaînés ont voulu exposer aux regards d'une foule qui rit et s'esclaffe en voyant les bras tendus, les muscles étirés, les côtes saillantes, le visage tiré par la souffrance, la tête dont le front sanglant rappelle les gestes de haine, d'ironie et de sarcasme…

Il regarde ce pauvre être écartelé dont les chairs saignantes ne sont plus que souffrances lancinantes, et dont le cœur éperdu lance un dernier appel vers cette puissance lointaine qui a voulu cela comme la plus belle offrande de l'amour d'un père à des enfants dont il voudrait ouvrir l'esprit et le cœur en dessillant les yeux…
Il contemple, éperdu, cette tête qui s'incline et il entend cette voix qui s'élève et qui clame le désespoir d'un cœur qui pourtant, armé d'une force infinie, aurait dû aller au bout de son destin de souffrance :
« O Père… pourquoi m'as-tu abandonné ?… »
Il regarde et écoute, cet Esprit lumineux, et il sait que ce sang qui coule, que cette vie qui s'en va, que cette vie qui s'éteint, devraient pourtant rester à travers le temps et les siècles le gage de l'amour offert dans l'abnégation totale et pure. Il sait que ce sang coule et que cette vie part, mais qu'un jour les Humains auront oublié ce drame et feront à leur tour couler du sang, partir des vies dans un geste déterminé et noir.
Il contemple et écoute, cet Etre de Lumière… et ses mains, dans un geste d'offrande, se tendent vers cette Terre indigne pour offrir, dans un geste d'amour, le don de son cœur et le gage de son sacrifice…
Et les cloches qui bientôt sonneront dans l'allégresse la naissance du divin Fils, ne sauront, pauvre matière froide, qu'en sonnant l'avènement de la joie, elles sonneront du même geste le glas de la Pureté et de l'Amour…

Recueillez-vous, enfants, dans ces jours à venir, et si vos pensées humaines s'égarent un temps vers des tables où des plats savoureux se présentent, tournez vos yeux vers cet azur serein et pur où des Esprits contemplent, contemplent et pleurent sur une Humanité qui, adorant le veau d'or, s'éparpille et se perd au lieu de se préparer dans la méditation profonde, esprits et cœurs ouverts, à cette joie pourtant pleine de tristesse : la naissance de l'Amour pour la mort de la Vie…
Aujourd'hui, bras ouverts, mains tendues, il contemple et écoute, cet Etre de Lumière, le théâtre de cette Terre et les sanglots qui montent ; il regarde les drames, les guerres, les tortures, les morts, les meurtres ;
il entend les cris de jouissance, les paroles de haine, les mensonges, les hypocrisies et aussi, les sanglots de désespoir et de déchirement, les râles de souffrance, les appels de ceux qui bientôt, remettront, comme il l'a déjà fait, leur esprit entre les mains de cet Etre d'Amour qui, tendrement, les accueillera dans un geste large pour les serrer sur son cœur grand et pur, sur son cœur immense et beau : un exemple pour que les vôtres, enfants très chers, soient à l'image de ce cœur d'Amour où pourrait jusqu'à l'infini des temps rester toujours ce nom de Dieu ; et avec tendresse, douceur et amour, il apprendra à ces pauvres êtres perdus à prononcer quelques mots, balbutier quelques mots… Il leur permettra de dire :

« Gloire à Dieu !… »


Archange Raphaël
médium : marcelle olivério
Quand le Ciel parle