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Le
bateau quitte le port dans l'allégresse immense et
la joie claironnante de ceux que cette promenade sous l'aile
blanche d'une voile enchante.
Il glisse, en frôlant à peine la surface de
l'eau limpide.
Le port s'éloigne, les embruns se font plus vifs,
le soleil darde ses rayons, les rires fusent
le port
s'éloigne
Que
n'ouvrez-vous, amis, votre radio qui vous dirait que le
grain venu brutalement d'on ne sait où, va arriver
!
Vous filez
On
tient la barre négligemment
La
houle se lève, le frêle esquif commence à
tanguer sur les vagues devenues plus grosses ; les creux
se forment ; le vent se lève
Ravis, vous êtes ravis
Vous bordez, vous tirez des bords ; non contents de cela,
vous envoyez le spi pour aller plus vite, plus vite encore,
et quand vous vous rendez compte de l'erreur, quand la bôme
commence à craquer, quand les mâts commencent
à bouger, quand les voiles claquent et faseyent,
se déchirant lamentablement, quand le vent aigre
et coupant vous cingle le visage avec les paquets d'écume,
les vagues grondantes, les creux hallucinants, vous réalisez
soudain que le port s'est éloigné, et que
seuls et perdus, dans des efforts dérisoires et inutiles,
vous allez à la mort.
Ne
soyez pas, amis, ces fiers voiliers aux ailes blanches qui
dansent sur l'écume des vagues.
Ne soyez pas, amis, ces coques éventrées sur
les récifs, ces coques blanches et belles d'où
toute vie est partie
Le
temps vient toujours où les pieds doivent reposer
très fort sur le sol ferme qui sécurise. Laissez
partir ces nuages auxquels vos mains désespérément
s'accrochent et veulent s'attacher car ils s'effilocheront
et vous chuterez
archange
Raphaël
médium : marcelle olivério
extrait du livre
Ephphata
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