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Les
Évangiles apocryphes
Présentations
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Écrits
Apocryphes
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Charles Mopsik
Le
Nouveau Testament nest pas la seule source relatant
la vie de Jésus-Christ et ses enseignements. Depuis
le commencement circulent dautres textes appelés
aussi « Evangiles », « Actes des Apôtres
», « Epîtres » dont plusieurs sont
considérés par lEglise comme inspirés.
Ces écrits dénommés apocryphes,
cest-à-dire, cachés, recèlent
la tradition orale du christianisme primitif, ils recueillent
des dits et récits transmis au sein des premières
communautés dans lexaltation dévotionnelle
et la plus fervente piété.
Certains dentre eux sont même antérieurs
à la rédaction des Evangiles canoniques et
sont à lorigine de liconographie chrétienne
qui y a puisé ses éléments les plus
évocateurs : ladoration de lenfant Jésus
par lâne et le buf, les Rois Mages, la
présentation de Marie au Temple etc.
Certains textes sont dune qualité littéraire
exceptionnelle, telle cette descente de Jésus aux
enfers dans lEvangile de Nicodème, dont Dantes
sest inspiré, ou encore cet hymne à
la vierge de lumière dans les Actes gnostiques de
Thomas.
Les
évangiles apocryphes constituent les rouleaux de
lobscur savoir venu à nous du fond de la mémoire
des premiers chrétiens. Leur existence en marge des
livres sacrés oblige à demander : pourquoi
avoir introduit certains écrits dans le corpus biblique
et en avoir écarté dautres ?
Dans la difficulté même quéprouvent
les théologiens à définir les récits
apocryphes, le problème que ceux-ci posent aux croyants
est mis en évidence : quest-ce qui différencie
les textes reçus dans le canon des écritures
sacrées de ces ouvrages parfois plus anciens que
les Evangiles autorisés par lEglise ? Peut-être
ces écrits, qui sont souvent dune haute spiritualité,
nont-ils pas été retenus parce quils
en disaient trop, mettant à nu lâme intérieure
chrétienne. Peut-être est-ce à cause
de la clarté insoutenable qui en émanait que
ces écrits ont été
cachés
pour ne pas dire censurés, et quils sont devenus
: apocryphes ! Ils disent à voix haute
ce qui se murmure dans les quatre Evangiles bibliques en
exposant la vérité sans nuance de lâme
chrétienne.
Présentation
Les apocryphes du Nouveau Testament sont les anciens écrits
chrétiens qui ressemblent aux livres du Nouveau Testament
au point de prétendre faire partie de leur rang.
Ils nont pas été reconnus par lEglise,
mais ils ont influencé considérablement la
tradition chrétienne et certains dentre eux
sont considérés comme inspirés. La
plupart ne sont connus de nous que par leur titre, leur
existence étant mentionnée par les Pères
de lEglise dans leur lutte contre les nombreux courants
hérétiques ou hétérodoxes qui
pullulaient au début de lère chrétienne.
Parmi eux, Origène, Irénée, Jérôme,
Eusèbe et surtout Saint Epiphane dont sa «
Réfutation de toutes les hérésies »
constituent les principales sources dinformation.
Les caractères généraux du Nouveau
Testament apocryphe ne sont pas seulement lusage pseudonyme
des noms des Apôtres, mais aussi leur imitation
des quatre genres du Nouveau Testament canonique : Evangiles,
Actes, Lettres et Apocalypses. En fait ce sont les premiers
fruits de limaginaire chrétien. Beaucoup dauteurs
ont voulu les rabaisser au niveau de simples fables. Certains,
comme Daniel Rops ont parlé de « délire
» à leur égard, tout en reconnaissant
quils contiennent des éléments de vérité
et « quil ne faut pas conclure que tout en eux
soit à rejeter » (Les évangiles de la
Vierge) Ces textes ont traversé toute lhistoire
de la pensée et de la foi chrétienne depuis
leur rédaction, poursuivant leur carrière
parfois souterrainement et face aux Evangiles de lumière
que sont les écrits canoniques, ils font figure dEvangiles
de lombre, recueillant les traditions orales des premières
communautés chrétiennes, déposant dans
les vides laissés par lEcriture consacrée,
leur moisson dimages et de paroles. Ils constituent,
à la vérité, les rouleaux de lobscur
savoir venu du fonds palpitant de la mémoire des
premiers chrétiens. Les apocryphes témoignent
de la vitalité luxuriante de la forte impression
produite sur la conscience des fidèles par lévénement
spirituel qui venait de se produire et dont ils étaient
presque les contemporains.
Il ne faut pas attendre de ces Evangiles beaucoup dinformations
historiographiques, mais la vérité du christianisme
naissant telle quelle a été vécue
par ses premiers sectateurs et telle quelle a marqué
la foi de lEglise de manière indélébile
? Ces textes posent une question encore plus redoutable
: leur simple existence en marge des livres sacrés
oblige à demander pourquoi avoir introduit dans le
corpus biblique, certains écrits et en avoir écarté
dautres ?
Dans la difficulté même quéprouvent
les théologiens à définir les écrits
apocryphes, le problème que ceux-ci posent aux croyants
est mis en évidence : quest-ce qui différencie
les textes reçus dans le canon des écritures
sacrées de ces ouvrages encombrants, parfois plus
anciens que les Evangiles autorisés par lEglise
? Aucun critère formel ne suffit pour témoigner
du caractère sacré ou inspiré dun
récit puisque Luc, lauteur dun Evangile
canonique, nétait point un apôtre et
vécut après les événements quil
relate. Paul écrivit des Lettres à
des particuliers qui furent incluses dans le Nouveau Testament.
Evangile selon Saint Luc : Prologue. « Puisque beaucoup
ont entrepris de composer un récit des événements
qui se sont accomplis parmi nous daprès ce
que nous ont transmis ceux qui furent, dès le début,
témoins oculaires et serviteurs de la Parole, jai
décidé moi aussi, après mêtre
informé exactement de tout depuis les origines, den
écrire pour toi un exposé suivi, cher Théophile,
pour que tu te rendes bien compte de la solidité
des enseignements que tu as reçus. »
Lon
sait que le terme grec doù vient le mot apocryphe
veut dire « caché ». Mais des livres
peuvent être tenus cachés pour leur éminence
comme pour leur caractère scandaleux. Cette ambivalence
est perceptible dans toutes les publications des apocryphes
du Nouveau Testament qui ont vu le jour. Dune même
voix, ces textes sont loués en raison de leur intérêt
historique, de linfluence quils ont eue dans
la religion populaire, et contestés comme riches
en éléments parfois contraires au dogme élaboré
par les conciles de lEglise catholiques.
Cest au sein du christianisme naissant, encore brûlant
des combats des premières communautés pagano-chrétiennes,
judéo-chrétiennes et hellénistes que
soriginent la plupart des apocryphes. Ils ne sont
pas luvre de théologiens savants, de
prince de lEglise. La pensée ny est pas
cristallisée, les événements ny
ont pas la belle architecture que leur ont donnée
les Evangiles qui sont entrés dans le canon -qui
signifie : la règle, la mesure. Certes, les écrits
apocryphes dépassent la mesure ; tout y est plus
abrupt, plus élémentaire ; les traits sont
grossis, amplifiés à lexcès ;
les faits narrés paraissent se rapporter plus intimement
au vécu qui les a porté.
Plusieurs, parmi ces livres, ont été reconnus
par lEglise, comme inspirés, mais ils nont
jamais bénéficié du crédit des
textes que le christianisme a intronisés comme Ecriture
sainte, ce qui souligne lembarras dont ils ont été
et sont encore la cause. Il faut que les fidèles
les lisent, disent certains, car ils sont très importants
pour comprendre les enjeux religieux et idéologiques
des premiers siècles, et leur lecture constitue une
introduction incomparable au Nouveau Testament préconisé.
Dautres affirment le contraire ; la vérité
est que ces livres sont des trouble-fête, dincongrus
représentants dune religion échevelée,
encore adolescente, dont daucuns préféraient
nier lexistence. Mais quelle institution savante,
quelle Eglise fixeront les bornes de lEsprit saint
? Or celui-ci, dans les divers milieux chrétiens,
a trop parlé. Loin davoir été
parcimonieux, il sest penché à foison,
dispensant linspiration à des écrivains
qui nétaient pas tous dune orthodoxie
rigoureuse.
Enfin, lEglise a choisi et ce ne fut pas sans hésitations
ni sans remords. Elle a décidé que certains
livres étaient canoniques, rejetant les autres comme
apocryphes. Et cela dès le IIème siècle.
Mais, de laveu même de ces autorités
ecclésiastiques, « on ne peut cependant oublier
que ces derniers [les apocryphes] ont simplement accentué
les tendances dont on peut en partie déjà
relever la présence dans les écrits canoniques
». La grande proximité des écritures
apocryphes et des uvres canoniques laisse pressentir
que lEsprit saint touche aussi bien les Pères
renommés de lEglise que dobscurs rédacteurs
issus du peuple, mais dont lélan religieux
et la dévotion sont tout aussi puissants.
ndlr : l'Eglise catholique réfute les écrits
inspirés de Marcelle Olivério comme provenant
de l'archange Raphaël bien que « comme on reconnaît
un arbre à ses fruits, on reconnaît un messager
à ses messages
». Ce qui n'a pas empêché
celle-ci de plagier certains textes dEphphata de Marcelle.
Nous en avons trouvé 5 exemples dans diverses revues
catholiques, bulletins diocésains, calendriers et
avons été témoins de la lecture dun
texte extrait dEphphata par Mgr Decourtray -Evêque
de Lyon- lors dune messe de minuit un 25 décembre
; bien entendu, on sest abstenu den préciser
la source et lauteur : larchange Raphaël
LEsprit
saint se moque des conventions de la république des
gens de Lettres. Le problème de la canonicité
des Ecritures est le talon dAchille des religions
révélées. Car, où arrêter
lEsprit saint ; où clore la révélation
? Quadvient-il des écrits inspirés que
lon exclut demblée du corpus consacré
? Ils deviennent littérature - La Littérature-
celle-ci est née du débordement
du Saint-Esprit quon a voulu endiguer, de la Parole
quon na pas su recevoir sinon en décidant
de son terme. Et la sainte inspiration a pris sa revanche
en suscitant des livres, beaucoup de livres -dont Ephphata
est un exemple- et lEcriture se fait littérature,
et les sages, les prophètes devinrent auteurs
écrivains.
Quel
a été le destin des livres apocryphes du Nouveau
Testament ? Loin dêtre oubliés et de
se perdre, ils ont pénétré si profondément
dans la conscience chrétienne que plusieurs des scènes
primitives, des archétypes du christianisme y ont
leur origine : telle la fameuse image de ladoration
de lEnfant Jésus par le buf et lâne
dans la crèche. Des fêtes en proviennent, que
lEglise na jamais réussi à écarter
de la liturgie telle la présentation de Marie au
Temple (21 novembre), telle la fête dAnne. De
nombreuses prières également en ont été
tirées -certaines sont lues le dimanche à
la messe- et surtout liconographie sacrée du
Moyen-Age et même celle de la Renaissance, ces sculptures
magnifiques, ces bas-reliefs, ces vitraux, ces tableaux
somptueux que lon aperçoit dans toutes les
églises et cathédrales, en un mot lart
chrétien, reste incompréhensible sans les
Evangiles apocryphes qui en sont le fondement scripturaire,
la source dinspiration.
En revanche, ces écrits nont
pas eu un destin aussi brillant du point de vue éditorial
: quelques traductions dispersées, comme si lon
voulait éviter de rassembler ces textes en un recueil
cohérent, (1) disponible aisément
et facile daccès, à linstar des
innombrables publications du Nouveau Testament canonique.
Si ces textes doivent être publiés, quils
le soient sans publicité, dans lombre de présentations
érudites que seuls des connaisseurs au savoir déjà
formé peuvent pénétrer. Ou bien alors,
quon les distille par fragments judicieusement choisis
ce ne sont pas des Ecritures saintes, de celles que les
missionnaires distribuent gratuitement, et que lon
édite en livre de poche. Faute de savoir où
le mettre, on laisse ce surplus dEsprit saint dans
de sombres bibliothèques, prisonnier entre des rayonnages
Dans
une anthologie de textes apocryphes présentés
par lui, lacadémicien Daniel Rops, reprenant
un mot dErnest Renan, qualifiait les apocryphes du
Nouveau Testament de « bavardages de nourrices ».
Il est vrai quune grande partie des Evangiles apocryphes
relate lenfance de Jésus, mais il se peut que
les propos échangés par les nourrices soient
du plus haut intérêt. Elles connaissent sûrement
des histoires ignorées des plus doctes
Les Evangiles de lenfance de Jésus
sont aussi les témoins fidèles de lenfance
du christianisme. Le christianisme a dabord été
une croyance populaire, une tradition de nourrices
et de gens sans savoir qui créditaient les miracles,
sans éprouver le besoin, comme les théologiens,
de les compter, den mesurer le réalisme. Dans
les Evangiles canoniques, Jésus fait déjà
beaucoup de prodiges ; dans les apocryphes, il en fait trop.
Pourquoi vouloir contester les miracles exagérés
des apocryphes au nom des miracles bien comme il faut
des Ecritures saintes du Nouveau Testament ? Il est
quelque peu cocasse de voir daustères théologiens
faire prévaloir la cause des Evangiles choisis par
lEglise sur celles apocryphes ; à
ironiser sur labondance des merveilles, lexcès
de miraculeux dont ces derniers regorgent. Pourquoi ne plaisantent-ils
pas sur ceux que lEglise admet ? Y aurait-il des miracles
sérieux et des miracles ridicules ? Que Jean parle
à des punaises qui lui obéissent ou que Jésus
multiplie les pains et les poissons, change leau en
vin ou ressuscite dentre les morts et sadresse
à ses disciples : quest-ce qui est le plus
insensé ? Les théologiens ont tort de vouloir
ficher les miracles dans la hiérarchie de la démesure
!
Une
nécessité historique : lon a besoin
de beaucoup de miracles pour convaincre les peuples, pour
impressionner les foules.
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Qui ne connaît lhistoire du jeune homme accusé
davoir volé une tasse en argent dans une auberge
et mise dans la poche de celui-ci par une serveuse dont
il avait refusé les avances
sur la route de
Saint Jacques de Compostelle :
le
pendu dépendu
Si les Apocryphes font rire, il faut rire aussi de certains
écrits reconnus par lEglise
et on aurait
tort
car il y a maints exemples de dématérialisations
et dapports dobjets.
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Nulle
par ailleurs
Les Evangiles apocryphes ne nous intéressent pas
seulement parce que ce sont des textes marginaux qui hantent
les écrits reçus et les rappellent à
plus de modestie ; ils renferment des traditions orales
qui ne se trouvent nulle par ailleurs et constituent la
préhistoire du Christianisme. La figure de Jésus
enfant y apparaît haute en couleur et dune franche
hardiesse. Il nhésite pas à provoquer
la mort de ses compagnons de jeu et à les ressusciter
tout aussi allégrement ; il se montre si insolent
envers ses maîtres qui prétendent lui apprendre
lorthographe, à lui, Jésus, fils de
Dieu, que Marie est contrainte de le réprimander.
Mais ces traits ne sont pas aussi fantaisistes quon
voudrait le faire croire. Très objectivement, le
Jésus adulte ressemble comme un frère au Jésus
enfant des apocryphes, mais, ici, lenfance rend encore
plus seyants les impulsions du caractère, le côté
indomptable qui lui est propre
Les divers Evangiles dépeignant lenfance de
Jésus sont unanimes dans le portrait quils
en font, si unanimes quil est probable quun
fonds de vérité les anime. Petit enfant génial
et insupportable, assuré de sa mission dès
le début, tel fut sans doute le Jésus réel.
Pour lui, pas dillumination comme il y en eut pour
Bouddha et dautres grands inspirés, fondateur
de religion. Lassurance immédiate, de tous
les instants, davoir son vrai Père dans le
Ciel, de nêtre pas nimporte qui parmi
ses semblables, mais, demblée, celui que les
autres attendent comme le Sauveur, le Messie libérateur
« Et il donna lordre (en parlant de Joseph)
à une des sages-femmes dentrer. Et lorsque
Zélémi se fut approchée de Marie, elle
lui dit : « Souffre que je touche. »
et lorsque Marie le lui eut parmi la sage-femme sécria
à voix haute : « Seigneur, Seigneur, aie pitié
de moi, je navais soupçonné ni entendu
chose semblable ; ses mamelles sont pleines de lait et elle
a un enfant mâle, quoiquelle soit vierge. Nulle
souillure na existé à la naissance et
nulle douleur lors de lenfantement. Vierge elle a
conçu, vierge elle a enfanté, et vierge elle
demeure. »
Plusieurs des Evangiles apocryphes vont jusquà
substituer à laccouchement de Marie une apparition
miraculeuse de lenfant (ce que croyaient les Cathares),
trouvant peut-être impudique lidée dune
naissance charnelle dun être si divin. Dans
la même inclination à la radicalisation dans
un sens spiritualiste des dits de Jésus, les apocryphes
font preuve aussi de fortes tendances encratiques dont lhostilité
au mariage, lascèse la plus rigoureuse ne sont
pas les moindres traits. Et parfois, cela va jusquaux
positions gnostiques exprimées par lEvangile
des Egyptiens dont nous navons que des fragments :
« Le Seigneur lui-même na-t-il pas dit
: je suis venu supprimer luvre de la femme ;
de la femme viennent les désirs, ses uvres
sappellent enfantement et mort ! » Ces paroles
proviennent de la chrétienté égyptienne
primitive, mais il est sûr quà ses débuts,
le christianisme tout entier était enclin aux pratiques
ascétiques les plus sévères et que
sa grande obsession était de combattre toute manifestation
de la sexualité
La femme représentait
évidemment le plus grand obstacle
Il faut comprendre
linsistance des Evangiles apocryphes qui, sans aller
jusquaux extrémités quont osées
les gnostiques chrétiens, exaltent la virginité
de Marie, en font la clef de voûte de la cathédrale
de la foi chrétienne. La lecture des divers Evangiles
de la nativité permettra de sen convaincre.
LEvangile de Thomas est conclue par la plus tranchée
des déclarations de Jésus allant dans ce sens
: « Toute femme qui se sera faite mâle entrera
dans le Royaume des cieux. »
Le climat gnostique imprègne lensemble de la
littérature chrétienne inspirée, apocryphe
ou canonique. Le christianisme a dabord pris racine
dans les milieux juifs gnostiques, et le constant dialogue
-parfois laffrontement- avec ces derniers, montre
à quel point il en est influencé.
La force de la gnose qui imprègne les apocryphes
a donné au christianisme sa dimension mythique. Des
mythes fondateurs émergent en effet de ces textes
et ne sont pas refoulés comme ils le sont dans les
écrits canon. Ils sont surtout centrés autour
du personnage de Marie. Quon lise le "Livre du
passage de Marie" en lequel sancre la fête
de lassomption, où les "Actes de Thomas"
(qui font pièce à lEvangile du même
apôtre) et lon naura pas de peine à
sen convaincre. De la fille de lumière à
la vierge immaculée, la mythique chrétienne
sarticule non pas sur Jésus, fils de Dieu,
non pas sur la résurrection, mais sur la virginité
féconde de Marie.
Le constat qui simpose après la lecture des
Apocryphes, à savoir que la gnose est la pierre angulaire
de la mythique chrétienne, est dune importance
majeure pour lorientation des recherches. Peut-être
ces écrits qui sont souvent dune haute spiritualité
nont pas été retenus parce quils
en disaient trop, mettant à nu lâme chrétienne,
ôtant le voile au frémissement mythique qui
la soutient. Peut-être est-ce à cause de la
clarté insoutenable qui en émanait, que ces
écrits ont été
cachés
-pour ne pas dire censurés- quils sont devenus
apocryphes. ils disent à voix haute ce qui se murmure
dans les quatre Evangiles bibliques, exposant la vérité
sans nuances à lâme chrétienne
au-dehors.
LEglise catholique interdit très longtemps
laccès direct de ses fidèles à
la Bible, exigeant quils passent par ses clercs,
ce qui fut lune des causes de la Réforme et
de la première traduction en langue moderne -lallemand-
de ce livre exécutée par Luther. Lheure
présente demande un degré supplémentaire
de dévoilement et de sincérité.
Quy a-t-il au fond du christianisme ? Une révélation
à laquelle beaucoup ont succombé, qui nest
ni politique, ni strictement métaphysique, mais sociale
: les apôtres, dans les Actes apocryphes, accomplissent
essentiellement un geste qui leur vaut dailleurs leur
martyre ; séparer les femmes de leurs époux,
de leurs promis. Prêcher lEvangile signifie,
avant toute chose, promouvoir la virginité au rang
de la plus haute vertu, de la qualité suprême.
Au point même que la virginité masculine est
objet de louanges et que, pour la première fois peut-être,
elle entre en scène dans le discours. Lapôtre
Jean, dans le livre du passage de Marie est seul digne de
porter la palme de lumière lors des funérailles
de la Vierge parce que dit le texte, lui aussi est demeuré
puceau. Il nest pas étonnant que la première
menace que lEglise organisée ait dû conjurer,
gise en ces tendances qui auraient conduit à lautodestruction
des communautés chrétiennes par défaut
de naissances (C'est ce que l'Eglise catholique reprochait
aux Cathares). Mais la mythique virginale dont est issue
lâme chrétienne marqua si profondément
lHistoire que les vux de chasteté demeurent,
aujourdhui encore, inséparables de la prêtrise.
Les apocryphes nous restituent avec tant de force ce climat
que leur étude est incontournable si lon veut
avoir une compréhension non superficielle de ce phénomène
dont on na pas encore assez senti limportance
pour le destin de lOccident.
Dun
point de vue purement esthétique, les textes apocryphes
ne manquent pas de charme ; il émane deux une
certaine fraîcheur qui fait parfois défaut
aux écrits canoniques, dun ton plus grave,
plus austère, soucieux de concilier théologie
et foi populaire, alors que les premiers jaillissent tout
droit -et sans filtre- du fonds de limagination chrétienne.
Cest peut-être pour cette raison quils
ont été lélément inspirateur
de liconographie ainsi que des croyances médiévales
en certaine légende comme lépopée
du Graal qui est issue des Actes de Pilate, appelé
aussi Evangile de Nicodème. Ils sont plus riches
en détails, plus pittoresques ; les écrits
sont plus étendus, moins fragmentaires, la trame
dramatique en est plus élaborée. Les citations
de lAncien Testament sont plus rares, parfois erronées
et les liens historiques paraissent relâchés.
Les personnages sy montrent cependant avec des réactions
humaines prosaïques. Bien quétant des
justes et des héros, ils sont en proie aux passions
tel Joseph apercevant Marie enceinte qui se lamente et projette
de la quitter à cause de ce quil prend pour
un adultère, avant, bien sûr, dêtre
rassuré par un ange, dans Histoire de Joseph le charpentier.
Ce même personnage apparaît en proie aux angoisses
de la mort et ne manque pas dune certaine grandeur.
Cest lun des rares textes où la paternité
de Joseph selon la chair est mise en évidence, peut-être
en liaison avec la doctrine juive du Messie, fils de Joseph
Ce qui distingue ainsi les Apocryphes cest ce paradoxe
: les miracles foisonnent, mais les passions humaines les
plus réalistes aussi, comme si, en insistant sur
le caractère divin de Jésus et de son entourage,
leurs aspects « terre à terre » prenaient
de lampleur.
Ce qui est sûr, cest lintérêt
inestimable de ces écrits pour la connaissance du
christianisme en ses plus intimes profondeurs, en ses retraites
où sont enfouies certaines vérités
qui méritent dêtre redécouvertes.
Ils recèlent des récits plus captivants, plus
cruciaux pour la culture européenne que les fables
et autres chansons de geste du Moyen Age dont ils sont dailleurs
une des principales ressources. Seule la franchise -souvent
très crue- du Nouveau Testament apocryphe soutient
la discrétion réfléchie du nouveau
Testament canonique. Pour que lon puisse parler à
lintelligence, il fallait que lautre sadressât
à limagination. Pour que lun règle
le dogme, il fallait que lautre suscitât la
foi
Les
textes proposés sont tirés du fameux Dictionnaire
des Apocryphes, publiés par labbé Migne
en 1856 et 1858.
Charles
Mopsik
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Le
Nouveau Testament apocryphe
auteur : Charles Mopsik
Il semblerait que ce livre ait été retiré
de la vente
et interdit dans les bibliothèques
!
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1.-
Charles Mopsik enfin exaucé puisque ont été
publiés « les Ecrits apocryphes chrétiens »
chez NRF.
retour
Les
Ecrits apocryphes comprennent :
Sur
Jésus et Marie
Prédication de Pierre
Evangile selon Thomas
Evangile secret de Marc
Protévangile de Jacques
Evangile de lenfance du Pseudo-Matthieu
Evangile de la nativité de Marie et de la
naissance du Sauveur
Evangile de la nativité de Marie
Dormition de Marie du Pseudo-Jean
Histoire de lenfance de Jésus
Evangile Arabe de lEnfance
Histoire de Joseph le charpentier
Evangile de Nicodème
Livre du Passage de Marie
Evangile de Jean
Evangile de Pierre
Questions de Barthélémy
Livre de la résurrection de Jésus-Christ
par lapôtre Barthélémy
Epitre des Apôtres
Fragments
évangéliques
Papyrus Oxyrhynque 840
Papyrus Egerton
Papyrus Oxyrhynque 1224
Fragment du Fayoum
Papyrus Strasbourg copte 5-6
Papyrus Berlin 11710
Evangile des Nazaréens
Evangile des ébionistes
Evangile des hébreux
Doctrine de Pierre
Traditions de Matthias
Evangile grec des Egyptiens
Evangile dEve
Evangile grec de Philippe
Agrapha patristiques
Visions et révélations
Ascension dIsaïe
Apocalypse dEsdras
Apocalypse de Sedrach
Vision dEsdras
Cinquième Livre dEsdras
Sixième Livre dEsdras
Odes de Salomon
Apocalypse de Pierre
Apocalypse de Paul
Livre de la Révélation dElkasaï
Puis, sur les apôtres
Actes dAndré
Actes de Jean
Actes de Pierre
Actes de Paul
Actes de Philippe
Actes de Thomas
Actes de Barnabé
Doctrine de lapôtre Addaï
Légende de Simon et Théonoé
Eloge de Jean-Baptiste
Troisième Epître de Paul aux Corinthiens
Epître de Paul aux Laodiciens
Correspondance de Paul et de Sénèque.
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Bibliographie
:
Apocryphes du Nouveau Testament : les Evangiles de
lombre de Charles Mopsik
Ecrits apocryphes chrétiens - Bibliothèque
de la Pléiade - NRF
Evangiles apocryphes réunis et présentés
par France Quéré - Points-Sagesse - Edition
du Seuil
LEvangile de Thomas - commenté par Jean-Yves
Leloup - Albin Michel
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