|
|
|
|
Sa pauvreté est légendaire. Lui, par
les mains de qui passent des sommes fabuleuses, n'a
rien à lui. Dans son presbytère, les
meubles sont réduits au strict minimum. Pour
les repas, une écuelle et une cuiller sont
sa seule vaisselle ; il n'a qu'une soutane, et ses
vêtements, il les raccommode lui-même.
Il donne tout, allant jusqu'à vendre tout ce
qui lui appartient en propre : mobilier, linge, pour
en distribuer l'argent aux pauvres. |
|
Un jour, Jean-Marie Vianney se dirige vers l'orphelinat.
Tout à coup, il se trouve en face d'un malheureux
vêtu de loques et dont les chaussures ne méritent
plus le nom de souliers. Il s'arrête, ôte
les siennes et les lui donnent sur-le-champ. Lui-même
poursuit son chemin vers la « Providence ».
essayant de dissimuler ses bas sous sa soutane. On
lui donne des chaussures fourrées
Le
lendemain, on le retrouve avec de vieux souliers aux
pieds. « Vous avez donné les autres ?
»
« Peut-être bien ». répond-il
simplement. |
|
|
|
|
|
Monseigneur
Devie, évêque de Belley, aimait beaucoup
Monsieur Vianney et ne cessa d'avoir pour lui une
très grande estime, dès qu'il eût
pris conscience que les attaques dont le curé
était l'objet n'étaient que de pures
calomnies. Il vint le voir à Ars plusieurs
fois, mais n'éprouva jamais le besoin de
lui décerner un titre honorifique, car il
savait bien que Monsieur Vianney n'y attachait aucune
importance.Son successeur, Monseigneur Chalandon,
ne pensa pas de cette manière
|
|
Le lundi 25 octobre 1852, Monsieur Vianney est au
confessionnal dans la sacristie.
« Monsieur le curé, Monseigneur
est là ! »
Un peu troublé, l'abbé sort, toujours
revêtu de son surplis, et se précipite
vers la porte d'entrée de l'église,
pour offrir de l'eau bénite à l'évêque.
De plus, comme c'est la première visite de
Monseigneur, il tient à lui adresser quelques
mots pour lui dire sa soumission filiale.
On dirait que l'évêque cache quelque
chose sous sa mozette
|
|
|
|
|
|
Dès les premiers mots du curé, Monseigneur
Chalandon retire rapidement le paquet qu'il dissimule
et le déploie devant toute la foule. C'est
un camail ! L'évêque annonce que Monsieur
Vianney est nommé chanoine honoraire. «
Non, Monseigneur, balbutie Monsieur Vianney qui ne
sait où se mettre, donnez cela à mon
vicaire. Il le portera mieux que moi ».
Rien à faire !
Monseigneur et son vicaire général l'abbé
Raymond, s'unissent pour revêtir l'abbé
Vianney de son camail. |
|
Puis l'évêque entonne le « Veni
Creator » et la procession s'avance vers le
chur. « On eût dit un supplicié
que l'on mène à l'échafaud,
la corde au cou », écrit la comtesse
des Garets. Arrivé à la hauteur de
la sacristie, le curé se faufile discrètement
et se réfugie dans un coin retiré
pour enlever ce vêtement de cérémonie.
Mais le maire, qui l'a suivi, réajuste le
camail et décide son curé à
le garder au moins pour la journée. «
Sinon, » lui dit-il, « vous feriez injure
à Monseigneur ».
|
|
|
|
|
|
Monsieur Vianney se résigne et revient donc
à l'église. Il doit subir les louanges
de l'évêque, disant quelques mots à
la foule pour justifier cet honneur conféré
au simple pasteur d'une petite paroisse. Celui-ci
écoute, tout décontenancé,
si grande est son humilité. La procession
se reforme vers le presbytère, le curé
avec son camail tout de travers, et ne songeant
même pas à l'arranger.
A peine l'évêque parti, l'abbé
Vianney ôte la belle pèlerine bordée
d'hermine, la palpe, la contemple :
« Ça fera bien de l'argent pour
mes uvres ! ». dit-il.
|
|
Arrive Mademoiselle Ricotier, riche personne d'Ars.
« Vous arriverez à propos, »
dit le curé, « je veux vous vendre
mon camail. Vous m'en donnerez bien quinze francs.
»
Mais il vaut plus que cela, Monsieur le curé
!
Vingt, alors ? »
« Je lui donnai vingt-cinq francs, »
raconte l'acheteuse
« Puis, ayant appris
qu'il en avait coûté cinquante, je
versai vingt-cinq francs de plus à Monsieur
Vianney » ; ce dernier se frottait les mains
en disant :
« Que Monseigneur m'en donne un autre,
et j'en ferai de l'argent ! »
|
|
|
|
|
|
En 1855, il est fait chevalier de la Légion
d'Honneur. La demande en avait été
présentée par le sous-préfet
de Trévoux et le préfet de l'Ain.
Le maire vient lui annoncer la nouvelle :
« Est-ce de l'argent pour mes pauvres
? » demande le curé.
« Non, c'est une simple distinction
honorifique !
Dans ce cas, puisque les pauvres n'ont rien
à y gagner, dites à l'Empereur Napoléon
III que je n'en veux point »
Evidemment, le maire n'en fait rien !
|
|
Peu après, Monsieur Vianney reçoit une
lettre de la chancellerie de la Légion d'Honneur
: on lui demande douze francs pour l'expédition
de la croix.
« Mais j'ai refusé, » dit-il,
« Non et non
Ces douze francs seront mieux
au service des pauvres ! »
On s'acquitte de la note à l'insu du Curé.
Plus tard, celui-ci, trompé, dira : «
Je n'ai point envoyé l'argent, et ils m'ont
tout de même envoyé la croix ».
Malgré tout, il ne l'a porta jamais
sinon
après sa mort, fixée, là aussi
à son insu, sur son cercueil. |
|
|
|
|
|
Ces marques honorifiques, qui n'intéressent
nullement l'humble prêtre, ne sont pas nécessaires
pour que sa valeur soit reconnue. Dieu, en effet
se plaît à souligner la sainteté
de son fidèle serviteur en permettant de
nombreux miracles du vivant même de Monsieur
Vianney. Impossible de les raconter tous ! Le curé
en obtient beaucoup par l'intermédiaire de
sainte Philomène, « sa petite sainte
», comme il aime à l'appeler.
Il a fait bâtir pour elle une chapelle où
il envoie prier les malades, les infirmes et les
grands pécheurs.
|
|
Une femme qui ne marche qu'avec des béquilles
se place sur le passage de Monsieur Vianney :
« Eh bien ! marchez, ma bonne »,
lui dit-il. La femme hésite.
« Mais marchez donc, puisqu'on vous le
dit », ajoute Monsieur Toccanier.
La femme essaie, les jambes sont solides, les premiers
pas sont bons, les béquilles tombent.
« Et emportez-les avec vous ! »
commande le curé en montrant les béquilles
du doigt. |
|
|
|
|
|
Le
25 février 1857, arrive à Ars une femme
de Saône-et-Loire, Madame Dévoluet ;
elle pousse dans une pauvre voiturette son garçon
de huit ans, incapable de marcher. Elle confie l'enfant
à une famille du village, et passe les premières
heures de la nuit sous le porche de l'église,
afin d'être plus sûre de pouvoir approcher
le curé. Ce dernier la voit dans la foule.
« Venez, vous, » dit-il, «
vous êtes la plus pressée ! » Elle
se confesse et oublie de parler de son fils. Aussi,
va-t-elle le chercher, puis elle se place avec lui
près de la sacristie pour assister à
la messe.
Dès
la fin de la messe, elle essaie d'entrer dans la sacristie.
On veut l'en empêcher.
« Qu'elle entre », dit Monsieur
Vianney. Elle présente son petit garçon
à bénir :
« Voyons, cet enfant est trop grand pour
être porté ainsi. Allons, mettez-le à
terre.
Mais il ne peut pas !
Il le pourra. Allez prier devant sainte Philomène
». Et le curé dépose un baiser
sur le front du petit bonhomme. Tenu par la main,
celui-ci gagne péniblement la chapelle.
|
|
|
|
|
|
Il
s'agenouille lui même, reste à genoux
près d'une heure, puis se lève.
« J'ai faim », dit-il. Il court
en chaussettes jusqu'à la porte. Mais il pleut.
« Si tu avais voulu m'apporter mes sabots !
»
La maman le prend dans ses bras, l'emmène chez
un sabotier, le fait chausser ; aussitôt, le
gamin, battant des mains de joie, s'élance
sur la route et ce met à jouer avec les autres
enfants.
Il n'y a pas de guérisons miraculeuses ! Dieu
peut tout !
Il
n'y a pas que les guérisons : l'abbé
Vianney, de son regard de feu, lit dans les âmes.
Antoine Saubin, ouvrier de Lyon peut croyant, se trouve
perdu dans la foule à l'église.
« Si ce prêtre » pense-t-il,
« a l'Esprit de Dieu comme ont dit, il saurait
que j'ai a lui parler et que je suis pressé ».
Le curé se retourne et lui dit tout haut :
« Patience, mon ami, je suis à
vous tout de suite ».
|
|
|
|
|
|
Une
dame en grand deuil voyage avec un groupe de pèlerins
en route vers Ars. « Permettez que je vous accompagne,
dit-elle au prêtre qui dirige le pèlerinage.
Je voyage pour me distraire. Autant aller là
qu'ailleurs ! » Le prêtre consent.
En arrivant au bourg, elle demande à l'abbé
:
« Pourriez-vous me ménager une
entrevue avec cet « homme-miracles »,
dont vous parlez entre vous.
Je ferai mon possible », répond
le prêtre.
A
peine le groupe est-il entré dans l'église
que Monsieur Vianney se dirige tout droit vers la
dame : « Il est sauvé
oui,
il est sauvé », lui dit-il à l'oreille.
« Ce n'est pas possible ». murmure
la pauvre femme.
« Si, il est sauvé ; il est en
purgatoire et il faut prier pour lui. Entre le parapet
du pont et l'eau, il a eu le temps de se repentir.
Votre mari était irréligieux, mais il
s'est parfois uni à votre prière ! »
La pauvre veuve retrouve la paix : elle était
hantée par l'idée que son mari qui s'était
suicidé, était en enfer !
|
|
|
|
|
|