Louis-Marie
Grignion de Montfort…

 

 

Le bon Dieu a déjà accordé à son Missionnaire le don des miracles et celui de connaître les événements futurs.
On lui demande de célébrer la messe pour une dame qui va mourir. Il le fait, mais il se rend ensuite chez la malade, et lui déclare :
– « Madame, vous ne mourrez point de cette maladie. Dieu veut vous laisser sur la Terre pour continuer vos charités aux pauvres. »
Ce qui arriva. Madame d'Armagnac guérit et vécut encore 12 ans, se dévouant plus que jamais au malheureux.
Montfort sur la route de Rome…
Mais Montfort, depuis l'histoire du bûcher, est devenu suspect à l'évêché. Un des Vicaires Généraux qui le comprenait et l'admirait, a été nommé évêque en un autre diocèse. Ceux qui le jalousent et ne peuvent supporter sa sainteté, en profitent pour le calomnier à nouveau.
L'évêque de Poitiers, lassé de toutes ces histoires, et poussé par son entourage, se décide à éloigner Montfort. Il lui fait donc savoir qu'il lui retire la mission de prédicateur qu'il lui avait confiée, et le prie de quitter le diocèse.
Le coup est rude. Louis-Marie le reçoit avec sa sérénité habituelle. Mais que ferait-il désormais ? C'est alors que remonte en lui le désir de partir évangéliser les non-croyants des terres lointaines. Mais auparavant, il veut aller à Rome pour demander conseil au pape lui-même afin de rester dans l'obéissance.
Il fait connaissance d'un étudiant qui se prépare aussi au pèlerinage. Tant mieux, ils seront deux à cheminer vers le centre de la chrétienté. Mais Louis-Marie veut voyager en pauvre.

– « Avez-vous de l'argent ? » demanda-t-il à cet étudiant.
– « Hélas ! Non, mon Père, je n'ai que 30 sous. »
– « Alors, je veux bien aller avec vous. »
Ainsi délivré de tout souci, les deux compagnons partent joyeusement sur la route, chantant et priant à haute voix, mendiant le pain et le toit de chaque jour.

Aujourd'hui, c'est un jeu d'aller de Paris -ou de Poitiers- à Rome. Les moyens de transport sont devenus si rapides et confortables !
Pour nos deux pèlerins, ce fut certainement autre chose : fatigue, rebuffade… on peut bien supposer qu'ils eurent bon pied de tout cela ; et pas tous les jours de quoi manger. Ils auraient pu chanter : « La route est longue, longue, longue… » mais ils préféraient sans doute cet autre chant : « je mets ma confiance, Vierge, en votre secours », composé par Montfort.

Sûrement, la beauté des sites traversés lui en inspira d'autres. On ne connaît pas exactement l'itinéraire de ce long voyage. On sait en tout cas, que Louis-Marie fit une longue halte à Lorette, où la tradition veut que des anges aient apporté la petite maison de Nazareth. Il se sentait donc là chez sa "bonne Mère".
On suppose bien qu'il fit un crochet pour s'arrêter aussi à Assise et y vénérer le souvenir de celui avec lequel il se sentait « en parenté d'âme » : saint-François.

Dernières étapes ; il hâte le pas dans la campagne romaine, et soudain, dans le lointain, lui apparaît le dôme de la basilique Saint-Pierre, il tombe à genoux. Des larmes de joie coulent de ses yeux ; de tout son cœur, il remercie Dieu. Et quittant ses souliers, il fait pieds nus, les dernières lieues qui le séparent encore de Rome.
Il y arrive exténué, mais tellement heureux ! Comme tout vrai chrétien, il se sent chez lui.

Après quelques jours, il est reçu en audience, par le pape Clément XI. Il a avoué ensuite qu'il fut, en l'apercevant, « saisi d'un respect extraordinaire, croyant voir Jésus-Christ lui-même. »
Avec beaucoup de simplicité, Louis-Marie expose ses difficultés, fait part de ses désirs quant aux missions lointaines et demande humblement ce qu'il doit faire.
Le pape l'écoute longuement, et se rend vite compte de la sainteté de ce "pauvre" prêtre. Mais la France a besoin d'apôtres de cette envergure.

– « Vous avez un assez vaste champ, en France, pour exercer votre zèle, n'allez point ailleurs. Et dans vos missions, enseignez avec force la doctrine au peuple et aux enfants ; faites renouveler les promesses du baptême. »
C'était assez dire que la manière dont s'y était pris Montfort, jusqu'à ce jour, était la bonne, puisque le Saint-Père lui-même, la lui conseillait. Pour lui donner autorité, le pape conféra à Louis-Marie le titre de « Missionnaire apostolique ».

Notre saint est bien content : il est sûr que c'est Dieu même qui a parlé par la bouche du Pape. L'âme en paix, il ne songe plus qu'à ce vaste champ qui l'attend : la France.
Au sommet de son bâton de routier, il fixe un crucifix que le Saint-Père a béni lui-même. Il ne s'en séparera plus : c'est vraiment son instrument de travail. Comme Saint-Paul, il veut plus que jamais ne connaître que Jésus, et Jésus crucifié. Le connaître, l'aimer… et le servir…

C'est le plein été, et le soleil d'Italie est cuisant ; mais que lui importe ? Le voilà à nouveau qui marche, qui marche… toujours mendiant, toujours joyeux.
Un jour qu'il a grand faim, il frappe à la porte d'un presbytère. Le Curé a du monde, et c'est justement l'heure du repas. Montfort, humblement, s'agenouille sur le seuil et récite un Ave Maria avant de demander la charité. On le prend pour un fou, et on l'envoie à la cuisine recevoir quelque morceau.

Montfort s'en arrange parfaitement, et revient dire « merci » au curé. Celui-ci, apprenant qu'il vient de Rome et retourne en France, s'exclame :
– « Pourquoi n'allez-vous donc pas à cheval ?
– « Ce n'était pas la coutume des apôtres, » répond aussitôt Louis-Marie, voulant donner par là une leçon de renoncement à ce prêtre trop ami de ses aises.
Comment d'ailleurs aurait-il pu se procurer un cheval ?

Jour après jour, il y a maintenant presque deux mois que notre Louis-Marie a quitté Rome. Il n'en peut plus… Heureusement, il est en vue de Saint-Martin-de-Ligugé, célèbre abbaye poitevine où il a fixé rendez-vous à Frère Mathurin.
C'est à peine si le bon Frère, le voyant « ainsi amaigri, exténué, bruni par le soleil… portant ses souliers en ses mains, ses pieds étant tout écorchés, son chapeau sous le bras, son chapelet à la main… » peut le reconnaître.

Le pèlerin va donc pouvoir souffler un peu, et surtout se replonger dans la prière -le silence de l'abbaye y est bien favorable- avant de reprendre sa tâche de missionnaire.
Mais non, car le diable veille et ses anciens ennemis aussi. Monseigneur, aussitôt prévenu du retour de Monsieur de Montfort, le fait prier de quitter le diocèse. Louis-Marie pourrait se défendre, parler de son entretien avec le pape. Un séjour en son cher hôpital lui ferait le plus grand bien… ainsi qu'à Marie-Louise. Sans hésiter, pourtant, il quitte Poitiers.


 
 
Louis-Marie
 
Grignion de Montfort…